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Grammaire énonciative

De Dominique Le Ray, 3 mai 2001

J'aimerais savoir qui parmi vous, a changé sa façon d'enseigner en incorporant la grammaire énonciative?
   * Ou qui l'emploie depuis le début de sa jeune carrière ?
   * Ou aussi dans l'étude des documents ?
   * De façon systématique ou occasionnelle?
   * Quels changements cela a-t-il impliqués ?
   * Quels points avez-vous modifiés et quelle terminologie employez-vous?
   * Quels sont les problèmes rencontrés ?
   * En tirez-vous des conclusions positives ?
   * Cela vous aide-t-il à éradiquer les "horribles fautes" dont nous avons beaucoup parlé ces derniers temps?
Pensez-vous que :
   * c'est une "révolution" fondamentale pour nous ?
   * ce n'est qu'une lubie de plus de quelques profs de fac, relayée par les grosses têtes des confortables bureaux parisiens ?
l'essentiel est ailleurs ?
J'attends vos réponses avec beaucoup d'intérêt.


De Nicole Darmency-Marguliew

Je l'utilise depuis plus de 10 ans et il me semble que c'est le seul moyen pour rendre compte des textes ou pour que les élèves utilisent l'anglais correctement. Exemple : un texte sur une femme indienne et c'est l'étude du passif pour mettre en valeur son statut de victime d'une société. Je pense sincèrement que cette approche eet la seule qui permette aux jeunes de ne pas ressentir la grammaire comme arbitraire, mais je n'affirme pas que les résultats sont extraordinaires, ils sont nettement améliorés, mais si nous n'avons plus les jeunes que pour 2 h d'anglais par semaine, il ne faudra pas en vouloir à l'approche linguistique, mais au Ministre.
Nicole ( j'espère avoir donné une réponse)
Nicole.Darmency@wanadoo.fr


De Lee Smart, le 8 mai 2001

Le débat actuel autour de la grammaire énonciative me paraît très intéressant. Il est difficile de comprendre certains collègues qui rejettent cette approche, de même que personnellement il me semble problématique de baser tout son enseignement là-dessous, pourtant, certains le font et ils le font avec beaucoup d'efficacité. Au fond, l'approche énonciative obéirait aux mêmes règles simples que beaucoup d'autres approches (sémiotique, narratologique, etc.), c'est-à-dire que certaines choses doivent être derrière le prof et non pas devant les élèves. A nous donc de faire des choix, d'adapter, de vulgariser - les verbes ne manquent pas -ce que nous apprennent les universitaires. Il me semble que le stage animé par Michel Moulin oeuvre dans ce sens.
Le problème de la terminologie se pose dans d'autres termes. Sans cohérence dans le "vocabulaire officiel" employé par les collègues de la (primaire?) 6° à la terminale, il va sans le dire que peu d'élèves (et collègues?) vont s'y retrouver. Ce qui est intéressant pour les élèves, c'est de placer l'énonciateur au coeur de la langue et de voir que la grammaire anglaise n'est pas si normative et qu'ils peuvent en jouer afin de moduler leur message.
C'est également, comme le dit Nicole Marguliev, une approche très réussie pour l'étude de textes en lycée puisqu'elle permet de déboucher sur une interprétation du sens créé par la présence de formes grammaticales dans le texte. On peut même (c'est ce que nous avons fait avec Michel Moulin et Nicole Charra dans le stage "du texte à l'image et de l'image au texte") tirer des parallèles entre une approche énonciative d'un texte et l'analyse de procédés filmiques, par exemple des angles de prise de vues, des cadrages etc. qui sont des moyens techniques dont dispose le réalisateur pour créer du sens qui va au-delà du contenu narratif. L'écrivain se servirait de formes grammaticales dans le même but.
Malgré cela, la grammaire énonciative est loin d'être la panacée et ne peut pas solutionner les erreurs grammaticales qui relèvent plus à mon avis de la mémorisation et de la rigueur que de la réflexion sur la langue. La semaine dernière, quelqu'un avait parlé de bon sens. Le bon sens exige de ne garder que ce qui est efficace pour les élèves et "rentable" pour nous.
J'espère que quelqu'un n'est pas d'accord avec moi parce que je trouve la liste parfois trop consensuelle!
A+ Lee Smart
P.S. Dominique, comment sais-tu que les bureaux parisiens sont confortables?!


De Dominique Le Ray, Mercredi 9 mai 2001

Lee, si tu trouves la liste trop consensuelle, on pourrait reparler de l'évaluation de l'oral en 1ère? :-)
Par contre, désolé, mais je suis d'accord avec ce qui tu dis de la grammaire énonciative...
Il me semble que l'apport n°1 de cette approche est de changer l'orientation de l'apprentissage de la grammaire. On fait de la grammaire parce que ça nous permet de nous EXPRIMER. Je n'emploie pas le Present Perfect PARCE QU'il y a since dans la phrase et le Prétérit PARCE QU'il y a ago, il n'y en a pas un de juste et un de faux, mais le Pres. Perf ET since ensemble, PARCE QUE C'EST CE QUE JE VEUX DIRE, et pas les deux autres. On devrait (?) donc bannir les ex. du type : "Mettre le verbe au temps qui convient" au profit d'ex. du type : "Je veux dire cela, dans telle situation, comment vais-je le dire ?" . Et ça n'est pas si évident que ça...
L'autre point important c'est ce que les liguistes appellent l'invariant sémantique, c'est à dire, un "sens général" qui s'applique à tous les effets de sens de cet opérateur. C'est très intéressant pour nous car cela devrait permettre d'atteindre une plus grande cohérence, et à priori, de simplifier les choses pour les élèves.
Seulement, tout n'est pas si simple. Ce qui me pose problème, c'est que cela exige une faculté d'abstraction que beaucoup d'élèves n'ont pas. Je vous donne un exemple : Afin de rendre plus cohérent l'étude du Présent Simple / BE + ING et des articles the / Ø en 6ème, je travaille la notion d'énoncés génériques / spécifiques, mettant en parallèle détermination verbale et nominale. Très bien. Ca passe plutôt bien, et ça aide la majorité des élèves. Mais les plus faibles,eux, ne sont pas capables de s'interroger sur l'énoncé qu'ils ont à produire, ils restent au ras des pâquerettes, produisant le mot à mot que l'on connait trop bien.
Et je me retrouve face à ce problème pour d'autres points : les structures verbales : Vb + to V ou Vb + Ving en 3ème : j'emploie les termes (peu scientifiques !)de "verbes qui regardent vers l'avant" et "verbes qui regardent vers l'arrière". Mais même comme ça, j'ai l'impression de laisser des élèves sur le carreau.
Le problème c'est que plus on s'élève au-dessus du texte, moins on se met à la portée des plus faibles. La question (très politiquement incorrecte...) est peut-être de savoir s'il y a réellement un espoir de faire apprendre une langue à ces élèves-là... Si oui, la grammaire énonciative est-elle la bonne solution ?
P.S. Lee, je suppose que les bureaux des ministères parisiens sont confortables car ceux qui y sont installés ont rarement envie de les quitter...


de Lee Smart, Jeudi 10 mai 2001

Politiquement incorrecte peut-être, toujours est-il que tu poses là des questions de fond. D'abord la question de savoir si on peut amener des élèves faibles à apprendre une langue. Je suis persuadé que oui, simplement, doit-on se fixer les mêmes objectifs pour tous les élèves ?(ce qui est actuellement le cas du programme officiel en lycée par example) Bien sûr on remet en cause un certain nombre d'idées fondatrices du système éducatif "à la française". Mais peut-on réellement apprendre la même chose à tous les élèves et de la même façon? A mon avis c'est une idée anti-pédagogique qui nie l'individualité et les besoins spécifiques des élèves (sans pour autant faire des cours à la carte). Si on constate qu'une approche énonciative de la grammaire ne porte pas ses fruits pour certains élèves, je crois qu'il faut accepter cela et revoir les choses; de même que si elle marche avec d'autres, il faut la garder! Évidemment ça se corse quand les deux cas se trouvent dans la même classe...
Malheureusement je n'ai pas vraiment d'expérience en collège, donc je ne parle pas en connaissance de cause, mais je me demande si on peut se servir de la grammaire énonciative comme "grammaire d'acquisition" ou si ce ne serait pas plutôt une "grammaire d'approfondissement et de consolidation", c'est de cette façon que je vois les choses en lycée - mais on ne part pas de rien!
Je trouve ton idée pour les exos très bonne, mais tu n'aurait pas dû la mettre sur la liste, c'est sûr que quelqu'un va te la piquer!
A+ Lee Smart


De C. Stancic, le jeudi 10 mai 2001

Pour les exos, voir les exercices de Making Sense, qui ne date pas d'aujourdh'ui mais qui avait du bon (elle est mécontente, elle dit:...) D'accord avec Lee sur la grammaire énonciative, qui n'est pas faite pour faire mémoriser qu'on ne dit pas must going. La rectification d'erreurs n'est pas non plus seulement une affaire d'entraînement et de répétition. Il y a une démarche psychologique qui consiste à admettre que l'on s'est trompé et que ce n'est pas sans importance. Errare Humanum Est nous fait beaucoup de tort.
C. Stancic


De Dominique Simonnet, le 13/05/2001


Pour être long (on aura déjà compris que je n'ai pas le don de la concision) et pour ne pas être forcément consensuel, je dirai que les interventions sur la grammaire énonciative me font craindre de voir poindre à l'horizon ce que j'appelle le "discours de LA méthode"
Je n'ai rien contre la grammaire énonciative, qu'on se le dise ! Mais j'ai toujours peur, que comme d'autres méthodes qui ont fait l'objet d'un engouement excessif, on n'en vienne à considérer que hors la grammaire énonciative, point de salut ("la seule qui ...", le Graal, le nirvana, de la pédagogie de l'Anglais !!)
J'étais encore étudiant quand la tante chez qui je logeais s'arrachait les cheveux avec LA méthode du tout Anglais. Les plus anciens d'entre nous s'en souviennent : il était sacrilège de prononcer le moindre mot de Français pendant un cours. Tout le vocabulaire devait être explicité en Anglais, et la grammaire elle-même était présentée en Anglais. La peur de l'inspecteur (Eh oui !) faisait que certains collègues "résistaient" en faisant tenir à leurs élèves un deuxième cahier de cours, (avec tout ce qui était interdit !), et ce, dans le plus grand secret, comme leurs parents écoutaient (?) Radio Londres dans les années 40 !! Comme avec toutes les autres méthodes, les bons élèves s'en sortaient fort bien, mais on laissait les autres sur le carreau ...
Plus que toute autre matière, l'Anglais a été l'objet de ces idéologies méthodologiques. L'exemple de l'apprentissage de la lecture avec la méthode globale (seule et unique vérité de l'époque) devrait nous servir de leçon.
Ce discours de LA méthode (qui change tous les 10 ou 15 ans ...) me hérisse. Je ne crois pas à LA méthode universellement valable pour tous les élèves de la 6ème à la Terminale. Ne pourrait-on pas simplement considérer que nous disposons de différents outils, approches, démarches, éclairages que nous pouvons et devons utiliser quand c'est nécessaire c'est à dire utile et efficace. Seule compte la rentabilité de notre enseignement à court moyen ou long terme. Et si à un moment donné le passage par le Français (la traduction, mot qu'une collègue avait tant de mal à avouer) est efficace, à défaut d'être idéal,( nous sommes tous d'accord), pourquoi pas ?
Le problème de la méthode se pose bien entendu toujours, mais pas de façon cruciale lorsque nous avons à faire à des élèves à l'esprit totalement ouvert et à qui l'on pourra faire acquérir tout ce que l'on veut leur faire acquérir, quelle que soit la méthode, l'éclairage, la démarche, l'approche (et j'admets qu'il y en a de meilleures que d'autres).
Le véritable enjeu pédagogique se situe au niveau de certains élèves de collège pour lesquels Dominique Le-Ray se posait la question de savoir s'il y a même un espoir de leur faire apprendre une langue, et qui sont totalement incapables de procéder à la moindre d'abstraction (ou d'analyser le moindre fait linguistique).
On ne dira jamais assez les trésors d'ingéniosité pédagogique que l'on est obligé de déployer avec ces élèves, dès la 6ème, pour qu'ils arrivent à comprendre et produire des énoncés de base en Anglais. (Et nos collègues de lycée classique doivent se souvenir que les élèves qu'ils récupèrent sont à priori globalement les meilleurs : nos collègues qui enseignent en CAP ou BEP pourraient témoigner de ce qu'ils ont à faire à tous les laissés pour compte de toutes les méthodes du monde)
Pour les élèves en difficulté dès la 6ème, la question est constamment de savoir quelle(s) autre(s) méthode(s) employer quand LA méthode (quelle qu'elle soit) échoue/a échoué/va échouer. Et j'aimerais bien que la recherche pédagogique se recentre sur ce problème. Il me semblerait bon que l'on se préoccupe enfin de travailler à faire sortir les pauvres de leur pauvreté, plutôt que de passer son temps à essayer de trouver encore et toujours une nouvelle méthode pour que les riches s'enrichissent encore mieux ...
Lee Smart disait que les professeurs de lycée avaient beaucoup à apprendre des professeurs de collège. Sans aucun doute. Mais pour avoir enseigné simultanément en collège et lycée, c'est à force de voir les fautes récurrentes de mes élèves de lycée que j'ai reconsidéré ma façon d'enseigner en collège, en redéfinissant des priorités fondamentales parfois non citées dans les référentiels. Je renverse donc l'assertion de Lee Smart en disant que les professeurs de collège ont beaucoup à apprendre des constats que font les professeurs de Lycée.
Au vu de ce que l'on constate en lycée, il me semble que le problème en collège est celui de l'acquisition et de la fixation d'automatismes de base, et, en prime seulement, si c'est possible, une prise de conscience des phénomènes linguistiques. ("grammaire d'acquisition" et "grammaire d'approfondissement").
Et puisque certains d'entre nous auront à corriger des copies de bac; ils pourront avec moi (correcteur en STI) constater que 80% à 90 % des fautes que l'on trouve relèvent de lacunes fondamentales remontant au collège (must going, can to, I want not ...) et ne portent pas de ces brillantes structures auxquelles faisait allusion Lee Smart et que l'on voudrait parfois ajouter à un édifice qui n'existe pas... A titre d'exemple, l'an dernier, en STI (matériaux souples), j'ai trouvé en tout et pour tout 6 mots de liaison différents en 80 copies : 99% de but, and, so, et because, un whereas, et 4 nevertheless (dans la même copie !), dans le cadre d'expressions écrites avec une "richesse grammaticale" délaissant presque l'intégralité de ce qui s'enseigne en lycée.
Le véritable enjeu pédagogique du choix d'une méthode se situe donc bien en collège, mais à mon avis, pas prioritairement pour les élèves qui de toute façon s'en sortiront.
En dehors de ces considérations générales le problème que me pose la grammaire énonciative tient à ce que disait Dominique Le-Ray : effectivement, " l'apport n°1 de cette approche est de changer l'orientation de l'apprentissage de la grammaire". Mais ne faut-il pas se poser la question de savoir si l'on ne risque pas de créer une confusion mentale définitive chez des élèves qui, au fil de leur scolarité, passeront d'une année à l'autre entre les mains d'enseignants dont certains pratiqueront la grammaire énonciative et d'autres pas ? A nouveau, des approches/éclairages/méthodes multiples seront formidablement enrichissants pour les meilleurs, mais qu'en sera t-il pour les autres ? L'absence de cohérence du cursus grammatical d'un élève peut avoir de quoi le désorienter
Et je ne parle pas de l'étude des autres langues vivantes, et en premier lieu du Français (le Bled a encore de beaux jours devant lui !). Le moins que l'on puisse dire c'est que l'harmonisation de l'enseignement de la grammaire n'est pas à l'ordre du jour que ce soit en terme de méthode/approche ou plus simplement de terminologie (énonciateur, locuteur, groupe verbal, prédicat, auxiliaire, opérateur etc.) Comment dans ces conditions permettre à nos élèves d'avoir un schéma globalement cohérent du langage et des langues ???
Qui parmi vous peut m'assurer que dans son établissement l'approche grammaticale des langues est homogène et cohérente pour le Français, l'Anglais, l'Espagnol, l'Italien, l'Allemand, etc. ? C'est peut-être gratifiant d'être à la pointe de la pédagogie, mais je crains que nous ne fassions parfois cavalier seul ou bande à part.
Pour prendre un exemple cité, je dirai que personnellement je ne me vois pas faire passer à des élèves l'idée qu'il n'y a que deux temps (le présent et le passé) lorsque dans d'autres langues nos collègues donnent à outrance dans la conjugaison (à réciter par coeur) de tous les "temps" possibles et imaginables ? Ne risque t-on pas de proposer à nos élèves une vision de la grammaire qu'ils ne pourront raccrocher à rien dans les autres langues qu'ils étudient, et à laquelle ils adhéreront peut-être momentanément, mais certainement pas fondamentalement ? En disant cela je souscris totalement, à ce que disait Lee Smart : "Au fond, l'approche énonciative obéirait aux mêmes règles simples que beaucoup d'autres approches (sémiotique, narratologique, etc.), c'est-à-dire que certaines choses doivent être derrière le prof et non pas devant les élèves".
Un dernier mot (promis, juré !) en réponse à une collègue qui s'adressait à moi en privé à propos des "recettes" et s'offusquait de ce l'on puisse par ce biais présenter des "règles" qui sont en fait fausses :
Après tout, nous tous sur cette liste, utilisons des ordinateurs et nous avons sur nos disques durs des "répertoires" qui n'ont en fait strictement aucune existence réelle, et nous effaçons et déplaçons des fichiers, ce qui ne correspond à aucune réalité physique ou matérielle. Ces termes sont une hérésie intellectuelle, mais ils sont une représentation tellement pratique que nous vivons tous très bien avec !!
Amicalement, et au plaisir de lire vos réactions.
Dominique.(qui ne saurait trop vous conseiller d'aller voir, s'il est encore à l'affiche, le film Chez les heureux du monde, d'après The house of mirth d'Edith Wharton : un régal !)


de Nicole Charra, le 13/05/2001


Je reviens du grand Nord et constate avec étonnement et ravissement que vous avez profité de mon absence pour vous en donner à coeur joie sur la pédagogie et la grammaire énonciative, sujets que vous aviez boudés il y a quelques temps ! Mais tout vient à point pour qui sait attendre ! Pour mettre mon petit grain de sel dans ce débat, je dirai que je suis de ceux qui pensent que grammaires traditionnelle et énonciative sont complémentaires et non exlusives l'une de l'autre. Certains points que nous avons nous mêmes eu quelques difficultés à maitriser dans nos années lycée (je ne parle peut-être que pour moi) par exemple la différence d'emploi entre un present perfect simple et un present perfect progressif, me semblent TRES faciles à résoudre si on passe par la grammaire énonciative, idem pour l'emploi de "the". Mais ce n'est pas utile pour tout. Je crois aussi que c'est un outil précieux d'aide à la compréhension de texte; moi qui suis plutôt scientifique et pas du tout littéraire et qui n'ai jamais compris pourquoi l'on ne m'enseignait pas une langue comme les mathématiques (j'ai hélas fait mes études avant l'apparition de la linguistique - ça me rajeunit ! - et je passe également souvent par les maths pour expliquer certains trucs (factorisation, vecteurs, additions, résolution d'équations à plusieurs inconnues ...), je trouve que la grammaire énonciative facilite l'approche littéraire (scientifique) d'un texte, et la preuve par neuf vaut mieux qu'une bonne intuition. Je ne suis pas sûre qu'il faille réserver la grammaire énonciative au lycée et ne pas l'utiliser dès la 6ème; les meilleurs élèves que j'ai eu l'occasion d'interroger dans les examens étaient des élèves qui avaient été abreuvés d'énonciation depuis leur plus jeune âge ! Il faut dire que les enseignants qui avaient "sévi" dans ces classes étaient maîtres de cet art ! Je ne crois pas non plus qu'il faille avoir peur du jargon; croyez vous qu'un élève comprend mieux "verbe" que "prédicat", "valeur du temps" que "valeur du prédicat" ? Ne croyez-vous pas que c'est une question d'habitude ? D'ailleurs nos élèves en savent beaucoup plus que vous ne semblez croire. Il font déjà de la grammaire pseudo-énonciative en français (c'est au programme) et j'entends parfois mes élèves utiliser des formules que je n'aurais pas osé utiliser moi-même de peur de ne pas être comprise; il est fréquent de leur entendre dire qu'il y a changement de point de vue dans l'énonciation ... Ce qu'il y a de sûr, c'est que l'enseignant ne doit parler que de ce qu'il connait bien et ce dans quoi il se sent bien, faute de quoi il ne sera pas entendu. Si la méthode change tous les 10/15 ans, je ne crois pas que ce soit seulement pour suivre la mode, mais plutôt parce que les avancées de la linguistique nous permettent de mieux comprendre certains faits de langue, d'affiner les explications, et il parait alors nécessaire de revoir nos pratiques pour faire profiter nos élèves des fruits de la recherche. Il faut un certain temps entre la découverte, l'appropriation et l'utilisation de nouvelles méthodes, et chacun doit pouvoir progresser à son rythme. Il n'y a pas LA méthode mais des pratiques, des approches individualisées adaptées chacun à sa personnalité. C'est la raison pour laquelle il est impossible à X d'utiliser le cours de Y tel que, car il doit passer par le filtre de sa personnalité et l'adapter aussi à son public. Cela n'empêche tout de même pas l'échange de recettes !

Nicole.Charra@ac-lyon.fr